Dimanche 2 mai avait lieu une opération de ramassage des déchets sur toutes les plages de Pénestin. Une cinquantaine de personnes s’était répartie entre les différents lieux, à l’appel de Cappenvironnement. L’objectif, explique Dominique Boccarossa, président de cette association active dans tous les domaines de la défense de l’environnement, n’était pas « de nettoyer la mer, mais de faire de la pédagogie à travers une opération de sensibilisation ».
Il est vrai que les deux ou trois heures passées à arpenter les plages pour y collecter des déchets divers sont une expérience instructive. « Beaucoup de morceaux de plastiques se coincent entre les rochers, notamment dans les enrochements. On n’arrive pas à les en sortir. En revanche, les oiseaux sont attirés, et pour eux, ces déchets sont mortels », raconte au retour l’un des volontaires. La collecte comporte des pièces de ferraille, du verre, des morceaux de filets… Et puis du plastique sous toutes ses formes, des billes minuscules jusqu’aux emballages divers tombés des bateaux espagnols. Plus les plastiques sont petits, et plus ils sont nocifs, car ils seront ingurgités d’autant plus facilement par les poissons et les oiseaux.
Des poissons comme les flets perdent leurs yeux
Il ne fait pas bon être coquillage filtreur dans un tel contexte, comme les moules qui flattent notre fierté autant que nos papilles, mais qui accumulent en quantité croissante métaux, microplastiques et autres, suscitant des craintes pour l’avenir. Sale temps aussi pour les bernaches qui choisissent nos rivages en hiver, mais trouvent de moins en moins à s’alimenter, tandis que d’autres espèces sont déjà décimées. Mardi dernier, un rapport du Réseau International pour l’élimination des polluants (IPEN) (voir ci-dessous), qui regroupe 600 ONG dans plus de 120 pays, alertait sur le fait que la pollution chimique menace désormais toute la chaine alimentaire, du plancton aux oiseaux (Le Monde, 29 avril 2021).
Phoques, otaries et ours polaires perdent leur résistance aux infections. Certains rejets industriels à base de polyéthylène se retrouvent à 10 000 mètres sous la surface des océans dans le corps de petits crustacés. Des poissons comme les flets perdent leurs yeux sous l’effet des pesticides. D’autres poissons, ou encore des grenouilles, mollusques et reptiles, ont cessé de se reproduire, car ils ont développé des caractéristiques sexuelles à la fois masculines et féminines. En 1799, alors que le développement industriel n’était encore que balbutiant, le peintre Goya avertissait déjà : « Le sommeil de la raison engendre des monstres. »
Sur quel ton faudra-t-il encore le répéter ?! Les signaux sont tous au rouge et cela ne s’améliorera pas avec le temps : « La production et l’utilisation de produits chimiques ont connu une croissance exponentielle au cours des deux dernières décennies. » (communiqué de l’IPEN) Pas besoin d’être matheux, tout le monde connaît désormais ce terme, associé à la pandémie du coronavirus dans ses pires effets, comme c’est le cas en Inde en ce moment. À propos, on trouve de plus en plus de masques jetés sur les plages, comme autant de pièges pour la faune de l’estran.
‘Big bags’ ou ‘belles poubelles’ ?
Frédéric Bernard, nouveau conseiller municipal d’opposition en remplacement d’Armelle Peneau-Mirassou, était présent dimanche. « Il faudrait mettre des panneaux d’information à côté des poubelles, qui indiqueraient par exemple le nombre d’années que demande la dégradation des différents types de déchets. » Il poursuit : « À Sarzeau ou à Damgan, il y a des bacs à marée tous les 500 mètres. À Piriac, ils ont fait faire de belles poubelles par un menuisier du coin. Tout ça, ça contribue à la mobilisation. Ici, ils sont faits à partir des containers qui servent aux couvreurs pour récupérer les ardoises, et on y ajoute des sacs Point P pour le sable ou le gravier, des big bags. On ne fait que de la récup’. » D’ailleurs, font remarquer certains, il n’y en a même plus à Poudrantais et au Maresclé.
Avec nos 25 kilomètres de côte, nous devrions être exemplaires. Ni Vannes, ni Lorient n’en ont autant, je pense ! Il y a partout des gens prêts à s’engager. Ils ont de l’énergie, des idées, de l’imagination. Il faudrait les soutenir plus. Un autre exemple : y a-t-il des panneaux pour avertir les pêcheurs à pied qui se garent sur le parking du Maresclé qu’en ce moment, les coquillages sont déjà ( !) contaminés au Dinophysis ? Toujours pas… Cela fait 2 ans, 3 ans qu’on les réclame… Vous saviez qu’en anglais, on parle de DSP qui signifie : « Diarrheic Shellfish Poison » ? Inutile de traduire, je pense.
Partout, c’est une accumulation de détails, mais qui ont tous leur importance. La chaine alimentaire est perturbée par l’action des humains, nous dit Le Monde. Mais nous ! les humains, ne mangeons-nous pas du poisson et des coquillages ? Et ne commençons-nous pas à pâtir de nos propres méfaits sur une chaine alimentaire dont nous faisons aussi partie ? À terme, c’est le spectre d’une planète devenue inhabitable qui se profile.
Prochaine opération de ramassage de Cappenvironnement : le dimanche 27 juin. Il se trouve que c’est un jour d’élections. De quoi accomplir deux gestes citoyens pour le prix d’un ! Après, vous pourrez aller vous faire un restau, promis. Ah oui, ce sera peut-être avec des moules du Danemark ou d’Italie, comme il y a deux ans…
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Ping : 2021-0502-Ramassage de déchets sur les plages après la grande marée le 2 Mai 14h - CAPPenvironnement
Les dernières études (2015) sur la qualité des eaux de surfaces ou souterraines dans le Morbihan confirment toujours la présence de nitrates, de pesticides, d’herbicides, d’azote ammoniacal, de phosphore, et encore du TBT Tributylétain (peintures antifouling) un cocktail que l’on retrouve naturellement dans les eaux estuariennes qui se mêlent à la masse des PCB (polychlorobiphényles) depuis quarante ans et des mycroparticules de plastiques présentes dans le Mor Braz (Atlas Bretagne environnement – Ifremer – observatoire de l’eau du Morbihan)
Les coquilles Saint jacques et les huîtres sont les premières touchées. Les bassins oxygénés – appelés bassins de purification – évitent la disparition d’une profession à moyen terme.
La qualité de l’eau en baie de Vilaine (un espace compris entre Damgan et Mesquer) s’est aujourd’hui stabilisée mais reste médiocre. Avec l’urbanisation et ses pollutions bactériologiques (Escherichia coli), on relève une altération constante de la qualité des eaux. Le port de plaisance du barrage d’Arzal rejette des « eaux noires » régulièrement car de nombreux estivants vivent sur leur bateau une grande partie de l’année.
Il est prévu, en France comme à l’échelle Européenne, d’atteindre le bon état écologique en 2027 des masses littorales bretonnes. C’est à dire 10 ans… si toutes les directives sont respectées.
La grande et incontournable priorité des mytiliculteurs de Pénestin est d’obtenir une eau de mer de meilleure qualité. C’est la vente des moules qui garantie l’avenir de l’entreprise. C’est l’eau en baie de Vilaine qui détermine la qualité sanitaire et gustative du produit.
Mais que valent les 3000 tonnes de moules par an de Pénestin face aux industries agro-alimentaires, agriculteurs conventionnels compris, face au développement d’une urbanisation spéculative et lucrative, présents à Pénestin et sur tout le bassin versant de la Vilaine ?
20 ans pour atteindre « un bon état écologique » semblent plus conformes à la réalité du terrain.
Dominique Boccarossa
Merci encore Gérard pour cet article et la pièce jointe.