Municipales : on ne votera pas dans les prisons (et ailleurs, on se contentera d’une information incomplète)

On voit peu à peu se faire jour une doctrine « française », face à l’épidémie de coronavirus. L’idée centrale semble être de ne pas paralyser le pays et de maintenir coûte que coûte un certain nombre d’activités. Même si on passe au niveau 3, les écoles et les universités resteront ouvertes, nous dit M. Blanquer, contrairement à l’Italie. Et l’exécutif semble décidé à maintenir les élections municipales prévues les 15 et 22 mars. On nous promet des masques et du gel à l’entrée des bureaux de vote : voilà un aspect technique, qui suffit, profitant de notre docilité, à occuper le devant de la scène.

Cependant, les élections municipales, dont on se plaît à dire qu’elles sont le premier échelon de la démocratie, risquent d’être bien « imparfaites », et il semble que l’État en ait pris son parti.

Il y a ceux qui ne viendront pas voter, car ils considèrent les mesures proposées comme des gadgets et craignent les risques de contamination dans les bureaux de vote, où des centaines de personnes vont se croiser et se succéder dans les isoloirs.

Il y a toutes ces communes situées dans des zones où les préfets ont interdit les activités supposant une rencontre physique entre les personnes, et où l’on imagine, comme par enchantement, que tout sera revenu à la normale dès le 14 mars. Va pour celles, comme Auray, où les mesures ont été prises dès lundi. Mais qu’en sera-t-il de la Corse, par exemple, où les cas de contamination n’ont été signalés qu’hier soir ? 10 jours, c’est une durée inférieure à celle de l’incubation pour les personnes atteintes… Et que dire pour toutes les villes et régions qui vont encore se révéler, et où le délai se réduira encore ?

Et puis, là où l’on a interdit les réunions publiques qui permettaient aux candidats de rencontrer leurs électeurs, de répondre à leurs questions, de débattre avec leurs opposants, peut-on considérer que les électeurs, privés de cette information, disposeront des éléments nécessaires pour voter en connaissance de cause ? Même les tractages sur les marchés, haut lieu des campagnes électorales, ont disparu, faute de marchés. Et l’équité aura-t-elle été respectée entre les candidats ? Ceux qui avaient concentré leurs réunions en fin de campagne en seront… pour leurs frais.

Certaines communes, certains élus, ont déjà commencé à s’exprimer sur ces sujets ? C’est une question qui fera certainement débat dans les jours à venir. Pouvons-nous accepter d’élire pour 6 ans des représentants municipaux et communautaires, alors que la campagne électorale n’a pas été menée jusqu’à son terme, que l’information sur leurs projets a été tronquée, et que certains candidats ont été défavorisés par rapport à d’autres ?

La démocratie est par définition un modèle imparfait. On connaît tous la citation de Churchill qui disait que « la démocratie est le pire des systèmes, à l’exclusion de tous les autres ». Mais est-ce une raison pour aggraver encore ses défauts ?

Un fait symbolise plus que d’autres cette situation : les détenus, qui avaient voté en 2019 pour les Européennes, ne voteront pas cette année pour les Municipales. L’administration pénitentiaire évoque la « complexité » de leur mise en place et des « difficultés organisationnelles ». « C’est de l’enfumage ! Les prisons n’intéressent personne », réagit François Korber, délégué général de l’association d’aide aux détenus Robin des lois, cité par Le Monde. Pourtant, l’installation de bureaux de vote dans les prisons pour les Européennes avait été un succès et avait suscité chez nombre de détenus une fierté et le sentiment, bien rare par ailleurs, d’une reconnaissance.

En mars 2018, Emmanuel Macron déclarait pourtant, dans un discours tenu devant l’École nationale de l’administration pénitentiaire : « Je vous le dis très sincèrement, on a essayé de m’expliquer pourquoi des détenus ne pouvaient pas voter, je n’ai pas compris. [Un détenu] est un citoyen dont la liberté est réduite, mais il n’en est pas moins un citoyen pour autant. »

La démocratie est un bien précieux, et il nous revient de pousser des élus parfois résignés, parfois fatalistes, voire apathiques, à prendre leurs responsabilités.

14 commentaires sur “Municipales : on ne votera pas dans les prisons (et ailleurs, on se contentera d’une information incomplète)”

  1. Gerard ! Ca fait toujours moins que les 8500 personnes que la grippe a tué cette année en France !
    Tu peux lire cet article ?

    thecommunication.com dix-informations-rassurantes-coronarovirus

    Valérie

  2. Du calme !!! On ne sait vraiment rien encore de ces pourcentages de mortalité réels ! Les informations de la Chine ne sont pas fiables pour nos critères occidentaux, les médias des États Unis nous envoient visiblement des chiffres bidons, j’espère que les scientifiques en savent plus , car venant du pays phare de l’épidémiologie, ça fait peur , ça sent la communication totalitariste à plein nez !
    Quant à nous , nos structures d’accueil sont tellement saturées dans les clusters , qu’on ne diagnostique plus que les cas graves et contacts sûrs… ce qui fausse complètement les données !
    C’est la première fois que l’humanité vit une épidémie en direct en temps réel mais ce n’est pas la première épidémie gérée par les scientifiques, et J’imagine que si les données s’aggravent l’état annulera ces élections… on peut en général faire confiance aux politiciens pour les parapluies géants !
    Valérie

    1. ça, c sûr , c la première fois que l’ on vit une épidémie en direct news……on nous ferait le même cirque avec la grippe …..

      1. J’ai regardé les infos sur France 2 ce soir. Il semble que la grippe saisonnière n’a tué “que” 55 personnes cette année en France. Quelqu’un peut-il confirmer ? Cela dit, je rappelle que mon article était consacré aux effets sur les Municipales, même si je suis ravi que ce blog offre un espace pour ceux qui souhaiteraient discuter sur l’épidémie elle-même.

  3. justement ;; ils ont fermé les frontières , puis confiné des villes, ils en ont 148 ( toujours moins que la grippe !) …. en France, 6 morts …. la différence ? en France ils agissent en écoutant les scientifiques CQFD

    Allez, bonne soirée

    1. À l’échelle locale, que les conseils municipaux prennent position et rédigent des motions pour faire entendre leur opinion. À l’échelle nationale, qu’on repousse les élections municipales et communautaires de deux ou trois mois en faisant voter une loi qui prolonge d’autant le mandat des équipes actuelles.

      1. reporte t on les élections quand il y a une épidémie de grippe ? 1000 morts par semaine ?
        Arrêtons la panique injustifiée.
        et écoutons les scientifiques !

        1. On en reparlera dans quelques jours… Malheureusement, car je n’ai pas de goût pour les bad news. Mais quand on sait que le taux de mortalité pour la grippe saisonnière est de 0,1, alors que celui, même surévalué, du coronavirus, est de 2 à 12 selon la tranche d’âge. Et celui-ci est 2 à 3 fois plus contagieux, on se dit qu’un bureau de vote est un lieu assez inhospitalier pour une population de sexas et septuas.

          1. si vous n ‘aimez pas les “bad news” écoutez les scientifiques , je n’ écoute qu’ eux et je ne panique pas ! quant à vos pourcentages , n’ oubliez pas qu’ ils se basent uniquement sur les cas avérés , en oubliant, forcément, les porteurs sains
            ..

          2. Une dernière réponse : après, si on veut continuer, on se téléphone !… Je ne suis pas du genre à paniquer, je suis aussi calme que d’hab. L’argument des porteurs sains ? Oui, why not ? Pour faire baisser les stats, il faut qu’il y en ait beaucoup, et ce n’est pas spécialement rassurant non plus… Un chiffre sans stats : 41 morts en un jour en Italie.

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