« D’argile, de sang et de cendres »

Emmanuelle Rabu, artiste mesquéraise, vient d’exposer au Bateau Livre ses peintures et calligrammes. C’était du 20 octobre au 30 novembre. Ça s’appelait « Oscillations ». Non, ce n’est pas tout à fait fini, il vous reste un jour : vendredi 30 novembre !

J’arrive !!

Aïe, j’ai failli rater une expo. Et pas n’importe laquelle en plus ! Je ne sais pas ce qui s’est passé. Je vais rattraper le temps par la queue, qui s’apprêtait à m’échapper, le temps bien sûr.

« J’abhorre les blancs. Le vide. Le manque. L’absence. Les non réponses aux non questions. Le silence toujours : mais qu’avez-vous donc à vous taire ? Parlez de but en blancs ! » (Temps du rêve) Ben oui, quoi ? C’est pas un musée ! Moi, de regarder et de lire, ça me donne envie de causer aussi, de faire écho, d’entremêler des mots et des choses.

« Les traits tranchent »

« J’aime les blancs pour leurs noirs. Je les envie d’être si denses. Les traits tranchent. » J’ai quelques amis qui diront : « faudrait savoir ! » La poésie est un droit, mes chers. Le droit de ne pas exclure les tiers. Au contraire : de les garder tout près, de les cajoler. Depuis quand on n’a plus le droit d’aimer et de ne pas aimer en même temps ? Vous les géomètres, vous savez bien qu’il y a des parallèles qui finissent par se rejoindre dans les mondes non euclidiens, tellement plus drôles que les écrans plats !

Cette expo qui oscille doucement ? « L’espace éclos d’une respiration », peut-être. « Une œuvre d’abstraction. Il y fait bon. On y est invité à s’attarder en laissant discourir les pensées. À toucher les tableaux pour regarder du bout des doigts. » (Espaces) Hum, oui, je respire, je ferme même les yeux et me remémore tes tableaux, Manu, tu permets que je te tutoie ? Ah oui, mais attention à la mémoire : « elle agace comme les fibres d’une mangue tandis que fond la pulpe aqueuse sur la langue » (En vie, en liberté). C’est bien vrai, ça, les fibres, ça agace, mais ce n’était pas vraiment de mémoire que je parlais.

« L’espace furieux des vociférations »

Emmanuelle ajoute : « Ce n’est pas un endroit de silence. Plutôt l’envers filtrant des coups portés par les furies, à l’extérieur. On y sursaute aux résonnances. » « Puis on s’apaise. » « On a confiance en l’édifice. » Oui, c’est bien une expo confiance, apaisante. C’est rare.

Mais Manu, Emma, Rabu (comme son grand-père, lisez ci-dessous !!), remonte à l’assaut : « l’espace furieux des vociférations. L’absence de limites où tout s’éclaire et tout se noie dans le fracas. Zébrures. Odeur de soufre. Vagues scélérates nées de nulle part à l’assaut des flottilles qu’elles soulèvent, enserrent, et réduisent à l’état de débris. Déferlement des forces brutes éprises de puissance, cinglées par des vents subversifs. Tonitruants attraits d’un spectacle sauvage. Du monde à décrypter. À amadouer. À l’abri dans mon phare, j’entends… » Vous aviez pensé : c’est une femme, elle est douce et apaisante… Vous aviez pensé : ce ne sont que des mots et des images… Et puis quoi encore ! Et de quoi sont faits nos cauchemars selon vous ??

« Un lit de sables émouvants »

Dans la « Revue Méninge #12 » : « Mon port d’attache à l’estuaire de la Loire a nourri mon imaginaire. Je me laisse volontiers porter au gré des mots. Parfois, je rame avec mes pinceaux. » Dans Collier d’O, elle parle de vous, de moi, de nos estuaires : « les limons enrichis d’un flot de particules se posent en profondeur s’embrassent et façonnent un lit de sables émouvants ».

Le jour où Emmanuelle a donné une interview (L’Écho de la Presqu’île), elle s’est contentée de dire : « Ce que je fais est tout à fait sincère, c’est de l’ordre du journal intime. En point de départ, il y a toujours une émotion forte et un besoin de dire quelque chose. » « Il m’a fallu un bouleversement personnel pour me lancer et lorsque j’ai commencé à écrire, je ne pouvais plus m’arrêter. A un moment, je travaillais le jour et j’écrivais la nuit ! »

Vous savez, les mots, ça brûle les doigts, ça brûle la gorge. Mais certains sont doux comme du miel.

 

Après l’expo,

vous retrouverez Emmanuelle Rabu

là : www.fepemos.com/emmanuellerabu

et là : « RM#12 Crachement »

 

 

1 commentaire sur “« D’argile, de sang et de cendres »”

  1. Ping : Mad Mix by Emmanuelle Rabu – Outlaw Poetry

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