par Edwige
Pour reconnaître un genêt d’un ajonc, nul besoin d’être botaniste, il suffit de mettre un pied en Bretagne. Encore faut-il ne pas inverser leur patronyme ! Voilà un excellent moyen de s’en souvenir : le genêt ne pique pas. « Je ne » pique pas.
Mais ces deux arbustes ont des caractéristiques communes : ce sont des légumineuses à fleurs jaunes poussant sur des terres pauvres. Les légumineuses, dites aussi fabacées, sont des plantes dont le fruit est une gousse (trèfle, haricot, fève, pois, luzerne, lupin, etc.) C’est l’une des plus importantes familles de plantes par le nombre d’espèces.
Comme beaucoup de plantes de leur famille, l’ajonc et le genêt sont aussi de la sous-famille des papilionacées, parce que leurs fleurs évoquent la forme d’un papillon. Elles rivalisent de beauté dans les landes de Bretagne où elles cohabitent, et ont inspiré bien des peintres et des écrivains.
Ainsi Julien Gracq, dans « Les eaux étroites » :
» À l’époque de la floraison, les deux nuances du jaune – subtilement différentes, mais toutes deux incurablement appariées à la tristesse – du genêt safrané et de l’ajonc couleur de guêpe : le premier, de teinte plus soufrée, plus neuve, mieux accordée à la gamme acide du printemps, le second plus mûr, à la fois concentré et amorti comme un vin vieux, qui brasille sur les buissons d’un vert noir comme un feu de broussailles sur les épines sèches. »

Mais parlons aujourd’hui du genêt, celui qu’on voit à Pénestin, c’est-à-dire le genêt à balais ou « cytisus scoparius ». C’est un arbuste vivace à feuilles caduques. Il est très résistant, mais il faut dire qu’il a mis toutes les chances de son côté : non seulement il a planté profondément ses racines, mais en plus elles pivotent. Le vent peut bien essayer de l’arracher, avec lui ça ne marche pas, d’autant plus que ses rameaux sont souples, et à l’image du roseau de la fable, il plie mais ne rompt pas.
Quant à la pluie, elle peut toujours s’acharner sur lui, le déraciner est quasiment impossible, car ses racines fixent le sol. Alors qu’est-ce qui pourrait mettre fin à sa prospérité ? Le froid ? Nenni. Il supporte jusqu’à – 25°. Les températures élevées ? Pas plus : la chaleur, il adore. En fait, seul l’âge a raison de lui. Il ne vit pas longtemps, une quinzaine d’années à peine.
Mais là encore, il a été prudent, en assurant sa descendance : les très nombreuses graines projetées au loin finiront par coloniser l’espace, au point qu’on le considère maintenant comme un arbuste invasif dans certains pays comme l’Inde ou l’Ouest des Etats-Unis. Son origine est européenne, mais il a été introduit sur pratiquement tous les continents.
Comment le reconnaître ?
Rien de plus simple ! L’été, ce sera les yeux fermés, au délicieux parfum qu’il vaporise tout autour de lui. Un vrai bonheur, qu’on ne peut goûter qu’à l’époque de sa floraison de fin avril à juillet, sur les petits sentiers où il habite. Les yeux ouverts, on le reconnaît à l’abondance peu commune de ses fleurs et à leur jaune éclatant.

A la fin de l’été, on le reconnaît à ses gousses d’abord vertes, puis noires, et à leur petit bruit sec quand elles éclatent par temps chaud. Car le genêt ne fait confiance à personne pour transporter ses graines, il n’a que mépris pour le vent, les oiseaux, les gastéropodes…, tous ces véhicules empruntés par tant d’autres plantes. Il tient à faire le travail seul.
L’hiver, une fois tombées ses toutes petites feuilles, les rameaux toujours verts du genêt se balancent gracieusement au vent en attendant le printemps.
Propriétés médicinales
Utilisé autrefois comme diurétique, il ne l’est plus maintenant à cause de sa toxicité. Toute la plante est toxique, du fait des alcaloïdes qu’elle contient, dont la spartéïne utilisée en pharmacie. On dit aussi que les moutons, consommateurs de genêts, seraient immunisés contre les morsures de vipères, la spartéïne rendant le venin inoffensif.
Utilisation
Les racines du genêt enrichissent le sol par la fixation biologique de l’azote. Il est utilisé en agriculture naturelle et en permaculture. L’écorce était utilisée pour le tannage et pour la fabrication de cordes.
Séché, on en a longtemps fait des balais, dans tout l’Ouest de la France. Il était également utilisé en remplacement du chaume dans certaines montagnes pour couvrir les toits. On l’utilise aussi pour chauffer les fours et pour l’écobuage (débroussaillement par le feu).
Magie noire
Jadis, Cytisus scoparius était considéré comme une plante magique. La fabrication des balais a été inévitablement associée à la sorcellerie. Nettoyer le sol avec ce balai devait permettre de lutter contre les forces négatives pouvant s’exercer dans la maison, tout comme l’accroche de bouquets de fleurs dans les habitations et les étables devait protéger du Malin !
Selon Prosper Mérimée : « Si les sorcières ne pouvaient pas monter sur un balai de bouleau, il n’y avait rien de plus facile que de monter sur un balai de genêt et aller au bout du monde. »