L’enquête publique s’est terminée vendredi, mais elle bouge encore ! 58 textes envoyés par mail à la commissaire enquêtrice sont disponibles à la lecture de tous sur le site de morbihan.gouv, auxquels s’ajouteront sans doute les réponses envoyées par courrier et celles consignées sur le registre de la mairie.
La démocratie représentative attache une grande importance à protéger les personnes en imposant un anonymat strict lors des opérations de votes (isoloir, enveloppe fermée…) On ne l’a peut-être pas assez remarqué, mais la démocratie participative, dont les enquêtes publiques sont une forme importante, s’appuie sur un principe inverse : les citoyens s’expriment oralement lors des débats publics et par écrit en exposant leurs opinions dans des courriers adressés au commissaire enquêteur. Seuls les rencontres avec ce dernier lors de ses permanences garantissent une confidentialité.
Nous avons donc une situation où les citoyens consultés lors d’une enquête publique s’expriment « à visage découvert », en répondant à l’obligation formulée à l’article 2 de la Charte de l’environnement de 2005 : « Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement. » Rappelons en effet que dans leur très grande majorité, les enquêtes publiques concernent des sujets environnementaux. Les citoyens s’expriment en sachant que leurs voisins, les commerçants, les professeurs de leurs enfants, les élus de leur commune, auront connaissance de leurs dires.
C’est un aspect peu analysé, semble-t-il, des enquêtes publiques. On a beaucoup dit que les citoyens renoncent parfois à s’exprimer, soit parce qu’ils ont le sentiment qu’ils ne maîtrisent pas la dimension trop technique des dossiers, soit parce qu’ils ont l’impression que les décisions sont déjà « ficelées ». Mais certains, très probablement, ne s’expriment pas par discrétion, par pudeur, ou bien par crainte d’être « montrés du doigt ». Ou s’ils s’expriment, ils risquent de pratiquer l’autocensure, qui introduit un biais conséquent dans une consultation.
On peut être amené à considérer que les élus d’une commune ont ici un rôle à jouer pour protéger l’expression de leurs administrés. La démocratie participative est par essence fragile. Ils devraient être attentifs à ce qu’aucun citoyen de leur commune ne puisse avoir à subir des conséquences suite aux opinions qu’il aura exprimées. Cette attention devrait s’appliquer tout particulièrement aux prises de parole publiques, lors d’événements festifs ou autres… Chaque élu devrait interdire à quiconque, et a fortiori s’interdire à soi-même, tout référence à ce qu’une personne a pu dire ou écrire dans le cadre d’une consultation. Cela vaut pour le contenu, bien sûr, mais aussi pour la forme (lapsus, maladresses, défauts de style…) que l’on serait parfois tenté de ridiculiser.
A défaut de telles précautions, que se passerait-il ? Il suffit de peu de choses pour que les citoyens « rentrent dans leur coquille », nous sommes bien placés à Pénestin pour le savoir ! La vie d’un village fait une place plus importante au « qu’en dira-t-on » que celle d’une ville. Tout obstacle mis à l’expression citoyenne risque de produire un affaiblissement de la démocratie qui constitue l’un de nos biens les plus précieux.