« Est-ce que vous avez fait des études sur les alternatives ? » La réunion est terminée, les rangs se vident, mais Dominique Boccarossa espère encore conclure la réunion en soulignant l’importance de cette question des alternatives. Et il n’a pas tort ! Quoi ? direz-vous, j’abandonne ma posture d’impartialité et me range du côté des thèses de M. Boccarossa !?
Pas du tout ! Je constate que Ouest France a publié ce matin un article de bonne qualité qui retrace plutôt bien le déroulement de la réunion publique sur le projet de parc Loscolo tenue lundi 24 septembre. (Je vous joins cet article ce soir à l’heure de la fermeture des marchands de journaux, dès lors que Ouest France a eu le temps de vendre ses exemplaires qui n’auront plus de valeur marchande demain matin quand paraîtra un nouveau journal.) Il n’est pas utile que je répète le même exercice, même si le pluralisme de la presse est l’une des raisons d’être de ce blog. Je vais écrire en fait 3 articles différents, pas trop longs et chacun suivant un angle spécifique.
La solution retenue est-elle plus satisfaisante que celles qui ont été écartées ?
Celui-ci, le premier, prend la suite de mes articles précédents et prend pour fil conducteur l’idée d’« alternative », qui est l’un des critères selon lesquelles la commissaire enquêtrice déterminera sa position favorable ou défavorable au dossier. La qualité d’un dossier dépend de sa capacité à présenter une solution en la comparant à des solutions alternatives et en expliquant pourquoi la solution retenue est plus satisfaisante que celles qui ont été écartées.
Or, d’alternatives, de leur présence ou de leur absence, il a beaucoup été question pendant cette réunion de trois heures. Axel Brière, jeune président du syndicat conchylicole de Pénestin, a su surprendre son monde. Il prend la parole après les premières questions et il annonce tout à trac : « Pour être honnête, je n’adhère pas au projet Loscolo. » Les édiles installés à des tables sur le côté gauche du public semblent avoir du mal à avaler leur salive. Mais il poursuit : « Défricher une zone, je ne suis pas pour. Je suis écologiste dans l’âme. Mais nous sommes dans une démarche de développement et si d’ici deux ans, je n’ai pas de place pour m’agrandir, je vais ailleurs. Le projet Loscolo a beaucoup de défauts, mais il n’y a pas de meilleur projet. Il n’y a pas d’alternative. » Le mot est lâché, il a été amené intelligemment et il claque alors qu’on ne s’y attend pas : « pas d’alternative ».
« There is no alternative ! »
Vous vous souvenez peut-être de Margaret Thatcher dans les années 1980, scandant « There is no alternative » alors qu’elle détruisait des pans entiers de l’économie britannique jugés non rentables. Cela est resté dans les livres d’histoire et ceux d’économie sous l’acronyme « T.I.N.A. ». Les Anglais sont connus pour leur sens de l’humour, parfois très noir. En France dans la même période, on a appelé cela la « pensée unique ». Et remontez encore un peu plus en arrière : vous trouverez Herbert Marcuse, l’auteur de « L’homme unidimensionnel » qui fut l’une des inspirations de mai 1968.
Pour en revenir à nos moutons et à nos moules, lors du dernier Conseil Municipal le 17 septembre, Jean-Claude Baudrais, maire de Pénestin, a répondu à Bénédicte Dupé, conseillère d’opposition qui proposait « Ce serait intéressant de réfléchir à une alternative » : « Non, il n’y en a pas. » Elle lui répond « si, si, si, si » et lui « non, non, non, non ». C’est dans Ouest France du 21 septembre. Par-delà l’humour involontaire de ces échanges, il y a une sorte de tragique à devoir reconnaître cette disparition des alternatives. On serait tenté de dire à M. Baudrais : « Même si vous le pensez, Monsieur le Maire, ne le dîtes pas ! Vous tombez dans votre propre piège : plus vous direz qu’il n’y a pas d’alternative, et plus Mme Souchet – Le Crom, en commissaire enquêtrice normalement constituée, risquera de penser : ‘les alternatives n’ont pas été suffisamment étudiées. Ce dossier n’est pas solide, il ne peut pas y avoir de proposition sans contre-propositions, ne serait-ce que pour pouvoir les réfuter. C’est ce que stipule la loi de 2010, c’est le B. A. BA.’ »
Du niveau de l’école primaire…
Et Dominique Boccarossa, bien sûr, enfonce le clou : « Le tableau qui donne des notes de 0 à 3 sur quelques critères basiques pour comparer les emplacements alternatifs du parc conchylicole, ce tableau est du niveau de l’école primaire. Il n’y a jamais eu d’analyse sérieuse sur les propositions alternatives. » Un autre participant à la soirée considère d’ailleurs qu’il y a une erreur de calcul et que le résultat de cette comparaison devrait être… le Logo !
Nous avions commencé par écouter Axel Brière. Mais il a un alter ego : Sylvain Chiquet, le président du groupement « La Pénestin » Lui aussi s’exprime avec talent. Le débat est assurément de bon niveau ce soir, quoi qu’on en dise. « La mytiliculture n’est pas rose, je vais pas vous la raconter. Il y a beaucoup de points sur lesquels on n’est pas bons : faut qu’on s’améliore ! Quelqu’un comme Axel Brière innove, mais il le fait dans une baraque de 50 m2 au Scal. Il n’a pas les moyens en termes de surface de se développer. Loscolo va nous aider à nous améliorer. Il n’y a pas de solution parfaite : Loscolo est la seule option que nous avons. »
Précisons cependant, avant de conclure sur cette question des alternatives ou de leur absence, que nous n‘en sommes qu’à la première enquête publique, dont l’objectif est de déclarer si les expropriations des parcelles que Cap Atlantique n’a pas pu racheter sont ou ne sont pas d’utilité publique. Ce n’est que dans une étape ultérieure qu’une autre enquête publique jugera – le cas échéant : si l’avis rendu sur la première a été positif – si le choix du site de Loscolo se justifie d’un point de vue environnemental. Autant dire que nous n’en sommes qu’aux débuts et que cette question des alternatives ou pas a encore de beaux jours devant elle…
(note : j’espère que l’article de Ouest France ci-dessous sera un peu plus lisible ainsi, même si ce n’est pas très esthétique…)
Les partisans du projet “Loscolo” se sont exprimés. Certains y vont, car il n’y aurait pas d’alternative. Mais qui devrait propose des alternatives ? Ce devrait être le travail de la Mairie et de Cap Atlantique ! La politique est un choix entre plusieurs voies proposées aux citoyens. Là c’est le “Loscolo” ou “Rien”. Alors plutôt que “Rien”, les conchyliculteurs n’ont pas d’autres alternatives que “Loscolo”. D’ailleurs les personnes de la salle ont montré à certains moments leur mauvaise humeur. Bravo M. BAUDRAIS ! Je reconnais là votre sens de la conciliation.