75 minutes. Ce sont les 24e vœux du maire de Pénestin, en place depuis 1995, et en principe ses avant-derniers. Comme chaque année, il indique son âge : 77 ans, depuis le 13 janvier. On se pince en l’entendant évoquer – car c’est nouveau – ses successeurs, qui, nous dit-il, bénéficieront de « la courbe descendante du remboursement des emprunts », signe d’une gestion communale respectueuse de l’avenir !
Quel est l’état d’esprit du maire à l’occasion de ces vœux ? D’emblée, il manifeste quelque aigreur. Claude Métaireau, président de Cap Atlantique et plusieurs maires des communes environnantes n’ont pas fait le déplacement. Ils sont à la cérémonie offerte le même jour à Saint Nazaire par le nouveau sous-préfet. « Il faut être bien avec son nouveau patron ! », assène-t-il. Paul Molac, député du Morbihan, subit aussi quelques piques.
3 naissances et 14 mariages
Qu’est-ce qui fera remonter le moral du maire ? La démographie d’abord ! Il y a eu en 2018 à Pénestin :3 naissances et 14 mariages. La population globale a augmenté en un an de 4,7% pour atteindre 1904 habitants. Il poursuit en faisant l’éloge des résidences secondaires (sur lesquelles il reconnaît avoir un différend « avec certaines personnes ici présentes ») qui finissent par devenir des résidences principales, car beaucoup sont à la recherche d’un territoire avec « une qualité de vie et un art de vivre ».
Du positif, il y en a aussi grâce à « Michel » (Bauchet), « chef de l’énergie ». Partagélec est un franc succès, « je suis fier d’avoir fait ça, c’est une de mes dernières réalisations. Et d’ailleurs, il y a pratiquement toutes les semaines des journalistes qui nous appellent, dit-il, car ils s’intéressent à l’expérience originale que nous menons. » Dont acte !
La Médiathèque, 600 lecteurs actifs, de multiples animations pour les petits et les grands : Laurence Lecacheux, la directrice, « gère cette affaire ». Cela marche parce qu’on a mis en relation une association et la commune… Les écoles : 119 enfants scolarisés. « Le principe auquel je tiens, c’est l’égalité de traitement entre le public et le privé. » Et à propos, M. le Recteur : « on pense à vous ! » Les travaux de réfection du sol de l’Eglise ont commencé.
« Ça n’a pas été facile »
Pour la Mine d’Or, après l’éboulement de l’an dernier, il a fallu prendre des décisions rapides pour rouvrir l’accès. « Ça n’a pas été facile. » Il fallait demander l’autorisation aux services compétents du Préfet qui mettent 10 jours à répondre. Mais on a pu compter sur la Réserve Communale de Sécurité Civile. Le projet PENEBOCO (Pénestin Éboulements Côtiers), avec des chercheurs de l’Université de Bretagne Sud, participe largement à relever le défi maritime et littoral. Oui, tout à fait d’accord, ce sont des questions essentielles. Pour ma part, j’irai volontiers interviewer ces chercheurs.
Venons-en aux projets. La fibre optique est prévue pour 2020 : voilà une bonne nouvelle ! Puisse-t-elle favoriser le développement du télétravail, mais cette question, évoquée l’an dernier, ne l’est pas cette année. L’ancienne gendarmerie : démolition ou réaménagement ? En cours, comme l’an dernier, mais on note que le mot « démolition » est désormais employé. Une réunion publique aura lieu. Le Club Nautique : une réunion aussi. Le parking de l’ancien supermarché Océan : réflexion toujours en cours. Le PLU : une réunion. Le Parc conchylicole de Loscolo : deux nouvelles enquêtes publiques et donc, deux réunions supplémentaires. Et le Débat National : le prochain Bureau Municipal discutera de l’opportunité d’organiser un débat.
Préparez-vous ! Prenez des cours d’expression orale ! L’année 2019 sera celle des réunions publiques ! Petite parenthèse : on attend encore le compte rendu promis après la réunion tenue en mars 2018 pour recueillir les avis de la population sur le projet de PLU. À propos du PLU justement, la loi ELAN aboutit à un durcissement de la Loi Littoral. « L’Etat nous fait faire des PLU, des SCOT, mais ils sont retoqués beaucoup trop facilement », dit le maire en se tournant vers le député Molac présent au premier rang. « Si j’avais eu la chance de participer à un débat avec le Président de la République, c’est ce que je lui aurais dit. »
Puis il revient sur le Parc conchylicole de Loscolo : colère à nouveau. Une nouvelle enquête publique, sur l’environnement cette fois-ci, démarrera le 14 février, puis une troisième. « Où va-t-on ? », demande le maire. « On assiste à une superposition de procédures qui ne servent à rien. Cela coûte, cela prend du temps. » Ce projet est ancien et il a été enfin approuvé, explique-t-il en référence aux conclusions de l’enquête publique de 2018 : « Nous avions 20 ans d’avance ! »
Des tweets à Pénestin ?
Au-delà de la colère, le maire évoque sa « souffrance », retour au point de départ… Oui, insiste-t-il, « j’ai vécu dans la souffrance pendant un mois et demi », et sa voix s’enraie : « J’en ressens encore de l’émotion. » « L’enquête publique a été l’occasion d’une campagne de désinformation. J’ai vu des tweets, des appels téléphoniques, afin de réunir 250 personnes pour voter contre. » Des tweets à Pénestin ? Il avait évoqué peu avant ceux de Donald Trump… Quant aux « appels téléphoniques », fait-il référence aux 351 signatures de la pétition réclamant le prolongement de l’enquête publique et la tenue d’une réunion publique ? (cf. mon article du 17 septembre 2018)
Non. De cette pétition il ne sera pas question. La réunion publique, c’est lui, le maire, nous dit-il, qui l’a réclamée à la commissaire enquêtrice « qui n’était pas très chaude ». Il a insisté. Mme Souchet Le Crom appréciera. La version des faits fournie par le maire dans son éditorial du dernier Bulletin Municipal s’est étoffée et enrichie de nouveaux détails.
Sans être partial, mais en faisant preuve du minimum d’esprit critique (comme je l’avais annoncé dès la création de ce blog), il est de mon devoir de journaliste indépendant de rappeler les faits. Mme Souchet Le Crom a pris, seule et « en conscience », la décision d’organiser une réunion publique, comme elle me l’avait confié, et selon les prérogatives qui étaient les siennes. Elle a certainement écouté le maire, dont nous ignorons ce qu’il lui a réellement dit, mais elle a aussi reçu les personnes venues lui remettre la pétition initiée par un collectif d’associations.
Nier l’existence d’une partie de ses habitants
Je ne crois pas outrepasser mon rôle en ajoutant qu’il n’est pas bon pour une commune de nier l’expression, voire l’existence, d’une partie de ses habitants. Même si le maire avait raison, même si le parc de Loscolo était la seule solution raisonnable afin de garantir l’avenir de la mytiliculture à Pénestin, on peut attendre de lui qu’il respecte ceux qui ont une opinion différente de la sienne au lieu de les stigmatiser et de les accuser de désinformation. Ils se sont efforcés de défendre leurs analyses par des moyens honnêtes, comme en témoignent les nombreuses contributions, souvent très argumentées, que l’on peut encore consulter sur le site internet de la Préfecture.
Les gens ne sont pas « coupables » pour avoir simplement voulu exprimer une opinion ou exposer une analyse, et la commune ne doit pas devenir un lieu où s’affrontent des clans. Le rôle d’un maire, notamment lors d’une cérémonie des vœux, est de s’adresser à tous. Nul ne doute de sa sincérité lorsqu’il dit avoir souffert durant l’enquête publique, mais c’est la commune elle-même qui souffre lorsque ses habitants sont montés les uns contre les autres.
J’assure mes lecteurs que je ne cherche nulle polémique en terminant cet article par ces remarques : je suis attaché à la justice et à la justesse et je ne peux rester sans réagir si elles sont maltraitées.
Les prochains vœux du maire concluront un quart de siècle de mandats. Formons le vœu, y compris pour lui-même (il serait justifié à en tirer une vraie fierté), qu’ils s’adresseront à une commune réconciliée !
moi, qui ne vais plus aux voeux depuis 10 ans, car nous entendons toujours les mêmes lamentations,apprécie ce compte rendu intelligent et sincère.