Si je vous dis que le projet de PLU (plan local d’urbanisme) de Pénestin a été bâclé, que le résultat est tellement mauvais qu’il vaudrait mieux tout reprendre à zéro, qu’il aurait été préférable de repousser de quelques mois l’enquête publique actuellement en cours, vous allez me répondre : allez, tu exagères, tu n’es pas objectif, tu vas encore nous faire un exposé à charge !
OK. Dans ce cas, je vous cite le courrier du Préfet du 22 décembre 2023, qui est consultable sur internet dans le dossier du PLU. (Ah ! Vous ne l’avez pas trouvé ? On en reparle ci-dessous) :
« Je sais que le contexte d’élaboration de ce document a été difficile, de par la durée du processus, mais également, du fait des problèmes rencontrés avec le bureau d’études placé en liquidation judiciaire en octobre dernier.
Malgré cet important travail, j’ai cependant noté diverses incohérences qui nuisent à la compréhension des objectifs de votre document et des imprécisions qui sont de nature à générer des risques juridiques importants dans le cadre de sa mise en œuvre.
Cela me conduit à émettre un avis réservé. L’avis que je vous adresse en pièce jointe (…) mentionne les éléments qui me paraissent devoir être ajustés afin de sécuriser juridiquement votre projet. »
Dieu que c’est formulé avec style ! Quelques cajoleries qui tiennent en deux lignes. (Néanmoins, la rédaction de votre projet était achevée et il avait déjà été arrêté par votre Conseil municipal lorsque le bureau d’études Futur Proche, sis à Saint-Herblain, a déposé son bilan.) Et c’est parti. « Risques juridiques », « sécuriser juridiquement » : oh ! Ça ne sent pas bon… Ce sont les termes en usage pour signifier que le projet va se faire étriller au moindre recours devant un tribunal. « Diverses incohérences qui nuisent à… » : aïe ! Des éléments à « ajuster »… Egale : poubelle ! J’ai été prof et j’ai vu des candidats à la licence ou au master fondre en larmes pour moins que cela.
« Cela génère des délais supplémentaires »…
Mais justement, le Préfet tend une perche : « il vous est possible, avec l’appui de mes services si vous le souhaitez, d’intégrer au dossier d’enquête publique un rapport en réponse à cet avis. » Voilà un représentant de l’État qui, décidément, sait mettre les formes. Mais la conclusion est déjà là, sans rémission :
« Toutefois, une relecture et une reprise du document préalables à un nouvel arrêt me semblent plus à même de sécuriser le contenu du projet et la procédure pour son approbation, bien que, j’en suis conscient, cela génère des délais supplémentaires. »
Aucune formule de politesse, encore moins de ces petits mots ajoutés à l’encre bleue, « très cher », « cher ami »… Tout au plus une syntaxe rendue légèrement hésitante pour émousser la brutalité du coup : « sécuriser (…) la procédure pour son approbation ». On a vu J. Chirac faire de même dans le passé. Le « Léviathan », pour reprendre le terme utilisé par un grand philosophe pour désigner l’État, a statué : veuillez revoir votre copie, Monsieur le Maire.
Qu’a fait M. Puisay, maire de Pénestin, selon vous, à réception de ce courrier ? On ignore les détails. A-t-il saisi la perche que lui tendait le Préfet ? A-t-il envisagé de retarder la suite de la procédure afin de procéder aux « ajustements » requis, de corriger les incohérences, de clarifier les imprécisions (cf. le détail dans le document pdf ci-dessous) ?
Corriger les incohérences, clarifier les imprécisions, cela fait beaucoup !
Non, il y en a trop ! Et on n’a plus de bureau d’études, a-t-il sans doute pensé. Et c’est déjà voté par le Conseil qui, il est vrai, ne se pose et ne pose pas beaucoup de questions. Et puis, en cas d’élections anticipées si un membre du Conseil était amené à démissionner, il vaudra mieux éviter de traîner ce poids en plus des autres pour aborder une nouvelle campagne électorale. D’autant plus que le projet de PLU a modifié à leur avantage le zonage des lotissements de campeurs-caravaniers : ces derniers, un quart de l’effectif des listes électorales, font le vote depuis bientôt 30 ans à Pénestin. Alors finissons-en et évitons de remuer tout cela à nouveau.
C’est ainsi, peut-on imaginer, que Monsieur le Maire a décidé de passer outre à l’avis du Préfet… Ou bien, autre hypothèse, il aura supposé que le commissaire-enquêteur allait intégrer dans son rapport la liste des ajustements réclamés par le Préfet. Ce serait un mauvais moment à passer, mais moins pire que le report envisagé par ce dernier, et surtout, cela ferait gagner du temps, dans le même but que précédemment. Cela dit, faire l’impasse sur une demande aussi résolue, voire pressante, du Préfet n’est probablement pas sans conséquences…
Mais, direz-vous (peut-être), n’y a-t-il pas quelque exagération dans cet avis ? Et pourquoi nous chercher des poux dans la tête alors qu’à Camoël, Férel, et dans bien d’autres communes les PLU ont été validés sans encombres ?
Il y a eu ce lundi soir, après la conférence de Gérard Le Maulf sur les finances d’une commune (j’espère que nous y reviendrons), un moment de débat sur l’état du PLU avec une quarantaine de présents d’appartenances et d’opinions très diverses, souvent bien informés des affaires communales, et qui tombent facilement d’accord pour juger que l’avis de la Préfecture n’a rien d’une exception parmi les 20 avis officiels qui sont intégrés au dossier. Et de citer ceux de l’Autorité environnementale, de la Chambre d’agriculture, du SAGE (schéma d’aménagement et de gestion des eaux), du CRC (centre régional de la conchyliculture) qui se fend d’un avis défavorable… Ils s’accordent même à donner une raison à ce déluge de mauvaises notes : le manque de transparence, l’isolement d’un maire qui n’écoute personne et « n’en fait qu’à sa tête ».
Concilier les intérêts particuliers au sein de l’intérêt général
La rédaction d’un PLU est, plus que tout autre, une démarche visant à concilier les intérêts particuliers au sein de l’intérêt général. Elle définit au moment présent les orientations qui déterminent ce que sera notre commune dans le futur.
Pour faciliter votre réflexion et votre participation, je vous présente ci-dessous sous format pdf la synthèse de 5 des avis officiels :
– Préfecture
– Autorité environnementale
– Conseil régional de Bretagne
– Agence régionale de Santé
– Direction régionale des affaires culturelles.
Voici auparavant un petit guide pour retrouver les documents eux-mêmes sur le site de la Mairie. Il est en effet apparu lundi soir que diverses personnes ne savaient pas comment y accéder. C’est le point de départ à défaut duquel il est bien inutile de parler de consultation et de participation du public.
Ou-sont-les-documents-synthese-de-5-avis
Derniers points :
– Cappenvironnement organise une réunion publique sur le projet de PLU samedi 9 mars à 16 h (Salle des Fêtes, derrière la Poste)
– le Collectif pour Pénestin tiendra aussi une réunion publique vers la fin du mois où sa commission « urbanisme » présentera la contribution qu’elle entend transmettre au commissaire-enquêteur (date encore non fixée).
Ping : M. Puisay, maire de Pénestin, possède-t-il les qualités pour être député-suppléant auprès de Mme Guégan (Horizons), candidate aux Législatives ? (2) - penestin-infos
Ping : L’enquête publique sur le PLU touche à sa fin - penestin-infos
Ping : Le projet de PLU n’aurait jamais dû sortir en l’état. L’enquête publique est une mascarade : réclamons sa suspension ! - penestin-infos
Le projet de PLU transforme des zones Ud d’urbanisation diffuse proche du littoral, en zones naturelles Na. Supprimer ainsi de la carte, des zones urbaines, permet dans créer de nouvelles ailleurs, en restant dans les clous de la loi zéro artificialisation nette.
N’est-ce pas une façon de contourner la loi ZAN ?
Pour accéder vite aux documents de présentation de l’enquête public :
Couper et coller le lien ci-dessous
https://www.registre-dematerialise.fr/5147/documents
Ping : 2024-0309-Réunion PLU - CAPPenvironnement
Merci Gérard pour cet article vigoureux, mais il ne faut pas dramatiser sur la difficulté d’accès au site de consultation du PLU.
J’ai bien vu les remarques assassines de la DDTM, qui nous écrit un projet de PLU ne prenant pas en compte :
– Une étude démographique avérée
– La Zéro Artificialisation Nette
– La loi littoral
– La préservation des espaces remarquables
– La gestion du Domaine Public Maritime
– La prise en compte des zones humides
Les remarques de la MRAE Bretagne ne sont pas mal non plus, en signalant une incohérence avec la réalité du territoire et en recommandant de :
– Justifier le scénario démographique
– Renforcer l’effort de sobriété foncière
– Protéger les franges littorales de la commune
– Compléter le dossier avec une analyse paysagères de qualité
L’avis de la Chambre d’Agriculture est plus accusateur « Au final le projet de PLU renforce le camping sous toutes ses formes ».
L’avis de la CCI MORBIHAN est plus policé. Il fait remarquer une étude basée sur des données de recensement de l’INSSE, non actualisées. Il apporte des solutions pour conforter la dynamique commerciale du centre-bourg.
L’avis de la CRC Bretagne Sud demande des infrastructures de traitement des effluents ajustées au développement démographique du territoire et des correction de zonage et de contenu du règlement écrit.
Devant les remarques de la DDTM sur les aspects environnementaux, j’ai été étonné de l’avis DES AMIS DU PAYS ENTRE DE MES ET VILAINES, sans remarque et trouvant le projet de PLU « novateur ».
L’avis DES AMIS DES CHEMINS DE RONDE, ne parle que du sentier côtier et de servitude de passage (certes seul objet de l’association), mais diverge de l’avis de la MREA, en trouvant le PLU très intéressant, par la prise en compte des enjeux naturalistes et sa volonté de préservation des paysages.
Je n’avais pas vu l’avis de l’ARS, mettre un programme de résorption des 40% d’installation non conformes d’eaux usées. Ça évitera d’être malade après avoir mangé des huitres cueillies sur le rocher, comme je l’ai vécu.
Avec tous ces avis, c’est rassurant de voir des analyses approfondies par des gens compétents, de notre administration Française et des organismes professionnels.
Devant le nombre et l’importance des remarques dans tous les avis, je me suis demandé si le sujet était l’incompétence du prestataire retenu pour l’étude du PLU, ou la pression exercé sur lui par certains élus. Apprendre que le bureau d’études est placé en liquidation judiciaire, fait penser à la première hypothèse, ce qui me rassure. Mais le choix de soumettre le projet de PLU à enquête publique, sans tenir compte des avis, est vraiment très étonnant.
Dans le style « incohérence d’étude pour un développement « raisonné » du centre-bourg », nous avons eu la « surprise » de découvrir que notre terrain, comme un certain nombre de voisins, qui avait donné lieu à un projet très sérieux et très élaboré d’Aful en association avec la précédente municipalité (puisqu’elle-même était aussi dans les propriétaires) avait été balayé d’un revers de main, bien que le projet construit avec un cabinet professionnel reconnu ,en prenant d’abord en compte les chemins et espaces naturels existants, offrait une cohérence de développement avec le bourg actuel (contrairement aux derniers lotissements bric-à-brac sortis de terre ), sans compter un certain pourcentage de logements proposés en « social » puisque la commune en manquait (= donc à la limite moins intéressant en rapport pour chacun des participants).
Si cela n’était déjà la non-considération de tout ce travail accompli par une trentaine de propriétaires Pénestinois, la « très mauvaise surprise » est effectivement aujourd’hui de constater – et d’avoir confirmation – que les 2/3 de la zone concernée (qui aurait pu être conservée en « réserve foncière » puisqu’à moins d’1mn à pied du centre-bourg ! autant dire rien) serait reclassé dans le projet en « zone agricole non constructible », la valeur des terrains étant donc réduite à 0 !!!
Déjà précédemment interpellé sur le sujet lors d’une réunion publique l’an passé sur le fait qu’un tel « déclassement » par décision unilatérale pourrait représenter pour certains des petits propriétaires du projet d’Aful une perte totale de « revenus éventuels » , M. Puisais, malgré mon insistance, avait été incapable d’apporter la moindre explication cohérente, à part de botter en touche en se reportant à 2050 !! , mais surtout de manifester le moindre sentiment de sollicitude (ou devrais-je dire de compassion) envers ceux qu’il pourrait ainsi léser…
Cet exemple concret démontre bien l’incohérence (sans aller jusqu’au mépris des observations du Préfet) dans lequel le projet de révision du Plu a été mené. Et le fait que le cabinet d’études choisi se soit « cassé la figure » semble être un élément supplémentaire de remise en doute de ses capacités professionnelles !
Mais par contre que ne fera-t-on pas pour les campeurs-caravaniers !